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Un peintre qui crée essentiellement une peinture figurative qu'on peut appeler fantastique, onirique, surréaliste,... Comme on veut... Bien que je ne sois pas insensible à toute forme d'art pourvu qu'elle me paraisse sincère et qu'elle provoque quelque chose en moi... Depuis toujours, je tente de peindre l'individu et la multitude, la matière brute et la lumière intérieure, l'arbre de vie, la femme et les racines, l'enfant et le devenir, la foule errante en quête de valeurs à retrouver, les voies parallèles, les mystères des origines et de la fin dernière... Les “SEUILS”, les félures, les passages qui font de nous d’ éternels errants insatisfaits entre mondes réels et rêvés , entre soi et autrui, entre Vie et Mort, entre bonheur et malheur... Un acte de peindre, nécessaire, à l'origine de rencontres furtives mais intenses, et qui fait naître, quelquefois, au bout d'un pinceau fragile, une parcelle de soi... ...ou tout simplement le plaisir et la douleur de créer...

samedi 30 juillet 2011

L'Art et le sacré. 1ère partie.





Le Centre Pompidou a installé une expo jusque Août 2008 qui s'intitule « Traces du Sacré ».
C'est après avoir lu un article sur cet évènement que je me suis laissé aller à penser, un peu de manière informelle, à ce qui peut bien relier l'Art à ce qu'on appelle le Sacré
Ce qui suit n'a rien de bien construit, c'est plus un jeu de correspondances qui me sont venues à l'esprit…
Correspondances? Cela me rappelle ce poème de Baudelaire justement, où les mots éclatent de vérités profondes et tellement évidentes pourtant … Allez, je ne peux résister à citer la première strophe qui nous rappellera le bon vieux temps du Lycée.
« La Nature est un temple où de vivants piliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles;
L'homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l'observent avec des regards familiers. »
Ce sentiment du Sacré, au sens non religieux du terme, de quelque chose qui nous dépasse, de quelque chose de confus mais de présent qu'on ne s'explique pas mais qu'on ressent fortement, qui n'a jamais ressenti cela au plus profond d'une forêt, devant l'immensité d'un horizon marin ou sous l'infini d'une voûte céleste ?
L'homme n'a eu de cesse de construire, imaginer, restituer, sous mille formes, ce sentiment indicible… avec cet outil unique dont il dispose, l'imaginaire symbolique. Déjà dans la grotte préhistorique des origines, le simple fait de se libérer du quotidien pour le « mettre en scène » le recréer, semble un acte fondateur d'une pensée qu'on a pu appeler magique mais en tous cas sensible à une autre approche que la simple réalité.
Ensuite, à l'image de la forêt primaire, mille piliers se sont élevés, mille temples se sont érigés de par le monde pour célébrer une divinité… L'Art, architecture, peinture, sculpture, musique, a conclu pendant des siècles, un pacte avec le Sacré dans son acception religieuse… pour le rompre brutalement dès la fin du 19ème siècle et définitivement un peu plus tard sous la forme d'un urinoir (de Duchamp) promu au rang d'une œuvre d'art !.… ou de « Demoiselles d'Avignon » de Picasso.
La rupture avec le sacré au sens religieux du terme était consommée, à moins de faire de l'urinoir un bénitier et des demoiselles de nonnes du Palais des papes… mais faudrait déstructurer le Palais, pas facile, ou le Pape, quasi impossible...
Mais l'œuvre d'art en avait-elle réellement fini avec le Sacré ? On peut en douter…
Une bizarre translation semble s'être produite dans nos pays occidentaux où le religieux expire lentement. La relation de l'Art à un Sacré en perdition semble avoir déplacé la notion de Sacré sur l'objet d'art en lui-même et les lieux où il s'expose… Les nouveaux temples sont les Musées et les galeries et les nouveaux prêtres, les intermédiaires entre la Terre et l'Indicible, les artistes...
Rappelons nous, croyants ou non, nos comportements dès l'instant où nous pénétrons dans une église, une cathédrale surtout… Les voix se font plus basses, le lieu en impose, les pas se font plus feutrés, on se risque à prendre une photo comme si l'on commettait un sacrilège, surtout avec un flash (le Fiat Lux est chasse gardée !)… Ce poids du sacré nous le ressentons aussi dans un monastère ou même au sein d'une ruine, seul, à la nuit tombée, près de quelques piliers, morts cette fois…
Déplaçons nous dans un Musée. Nous retrouvons souvent les mêmes attitudes… Certes, on ne communie pas devant l'autel et le christ en croix mais une ferveur admirative nous presse autour d'une Joconde quasi canonisée ou d'une Marylin de Warhol, véritable icône des temps modernes… les Musées contemporains, œuvres architecturales souvent audacieuses (comme le Guggenheim de Bilbao) sont les nouveaux temples d'oeuvres sacralisées où l'on vient communier par le biais d'un Tour operator…
Et si vous avez déjà poussé les portes d'une galerie de prestige, vous y avez certainement retrouvé le même cérémonial. Or quelqu'un a dit (je ne m'en souviens plus): « le sacré, c'est ce qui ne peut se donner ni se vendre »…. La définition ne semblerait pas coller avec ce qui est en jeu dans le « saint des saints » de la galerie à moins que, dans cet espace, … le sacré n'aille se nicher, non pas seulement dans l'œuvre, mais dans ce qu'elle vaut, le Dieu Dollar… d'autant plus sacré que le nombre de zéros augmente.
Ainsi le sacré semble s'être déplacé vers l'œuvre elle-même en tant qu'objet d'autant plus si elle s'inscrit dans un espace qui la sépare du monde profane. L'objet banal issu du quotidien accède à un statut supérieur et différent de par sa disposition à l'intérieur de l'espace sacré du musée.
Replaçons notre urinoir parmi ses alter ego chez Leroy Merlin par exemple, et la décadence est certaine… Le sacré en prend un sacré coup !… Il est vrai que l'estampillage Leroy Merlin est plus prosaïque que celui du Centre Beaubourg… Mais c'est moins cher. En 1999, un des urinoirs de Duchamp fut vendu aux enchères pour la bagatelle de plus d'1,5 million d'euros !… En cela le Jacob Delafon est nettement plus démocratique.
Inversement, il me semble qu'on a déjà essayé d'uriner, par provocation ou dans un grand jet purement dadaïste, dans un des urinoirs de Duchamp (aussi appelé Fountain) . On cria aussitôt au scandale, à l'iconoclasme, au sacrilège, à la profanation, et j'en passe… Un destin bien paradoxal pour une œuvre qui se voulait au départ aller à contre-courant, à l'encontre de l'art officiel, du savoir-faire, qui intronisait la pratique du ready-made, remettant ainsi en cause les fondements de l'art et sa sacralisation. Faites la même chose chez Leroy Merlin (je n'ai pas d'actions chez eux, craché, juré !), vous vous en tirerez avec une amende pour attentat…. à la pudeur. C'est Duchamp qui de son piédestal céleste doit bien rigoler, à moins que tout cela finalement n'eut rien de spontané. Un coup de bluff qui a bien fonctionné ? Aurions-nous été dupes dès le départ ?

Je vais vous quitter temporairement… Un besoin pressant m'appelle chez Leroy Merlin… pour du papier à tapisser (purement décoratif à 12 euros le rouleau).
Mais on ne peut s'arrêter là, ce serait un peu simpliste. Il est évident que derrière cette histoire pro-statique d'urinoir, on sent un bouillonnement d'idées, il y a bien plus que ce qu'il en paraît. Un 2ème épisode tentera d'explorer pourquoi, malgré la fin apparente du lien Art/Sacré, l'Art contemporain, malgré ses excès et ses dérives, n'a pas brisé le lien, loin s'en faut… Et qu'un Sacré compris dans son sens large, spirituel, débarrassé de toute connotation religieuse, est indissociable de l'Art. Il en sera toujours ainsi qu'on le veuille ou non...
C'est peut-être aussi cela que nous ressentons confusément dans notre relation à une œuvre, ce qui expliquerait nos comportements, le fait qu'elle parle de l'artiste, de celui qui la regarde ou l'écoute, et d'un « plus » indéfinissable qui établit la relation entre les deux et la relation à un Indicible, ce que Paul Diel appelait le « Mystère »…

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