... et aussi le simple plaisir d'écrire.

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Un peintre qui crée essentiellement une peinture figurative qu'on peut appeler fantastique, onirique, surréaliste,... Comme on veut... Bien que je ne sois pas insensible à toute forme d'art pourvu qu'elle me paraisse sincère et qu'elle provoque quelque chose en moi... Depuis toujours, je tente de peindre l'individu et la multitude, la matière brute et la lumière intérieure, l'arbre de vie, la femme et les racines, l'enfant et le devenir, la foule errante en quête de valeurs à retrouver, les voies parallèles, les mystères des origines et de la fin dernière... Les “SEUILS”, les félures, les passages qui font de nous d’ éternels errants insatisfaits entre mondes réels et rêvés , entre soi et autrui, entre Vie et Mort, entre bonheur et malheur... Un acte de peindre, nécessaire, à l'origine de rencontres furtives mais intenses, et qui fait naître, quelquefois, au bout d'un pinceau fragile, une parcelle de soi... ...ou tout simplement le plaisir et la douleur de créer...
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mercredi 3 août 2011

Tentation ...


 

Ne vous est-il jamais arrivé de vouloir passer à la trappe ?…. J'entends par là, un jour, d'avoir eu envie de tout lâcher, de faire retraite dans une Abbaye comme celle de la Trappe par exemple.
Si vous êtes un jeune lecteur, cela ne risque pas de vous arriver de sitôt (ou Cîteaux…).Il faut peut-être déjà avoir ressenti une certaine lassitude, avoir porté un regard un peu désabusé sur ce qui fait le quotidien pour éprouver cette envie curieuse d'isolement…
Il m'est arrivé comme beaucoup de regarder un documentaire sur la vie monastique ou de visiter un monastère au cours de mes pérégrinations. Rien de plus banal….
Et j'ai quelquefois éprouvé, vous allez dire cette fois-ci c'est la fin, il est en plein délire mystique ! , comme un sentiment insidieux, une tentation (un peu comme celle de Saint-Antoine mais les démons avaient changé de look), une quasi fascination pour, à la fois l'atmosphère paisible du lieu mais aussi l'ordonnancement parfait des actes qui se répétaient à l'infini, chaque jour identiques à eux-mêmes… Ding ding dong, ding ding dong… C'est l'heure de mâtines…, nones,... complies.
Quand le mouvement incessant de la vie ne vous laisse aucun répit ou, à l'opposé, quand la routine implacable ne vous laisse que du dépit, cette répétition monastique des mots et des actes à l'infini semble apporter la paix à ceux qui la pratiquent.. On peut encore comprendre que le lieu clos, rassurant, l'emploi du temps quasi intemporel à force de recommencement à l'identique fassent envie aux fatigués de la vie trépidante du monde profane… Mais comment expliquer que cette litanie sempiternelle des jours et des nuits ne deviennent pas aussi, à l'exemple de ce qui peut se passer au dehors, routine écrasante, habitudes intolérables ? …. Peut-être qu'une routine porteuse d'un sens, qui élève l'âme (si l'on se place du point de vue du pratiquant), même si elle peut paraître trompeuse pour un athée, transcende cette routine et libère l'homme du matériel pour se consacrer au spirituel…
Ce qui exténue l'homme au dehors de la clôture, l'use, l'ennuie, le vide de sa substance permet peut-être au moine de se construire, de se débarrasser des imprévus, des petites inquiétudes de la vie qui peu à peu nous rongent pour pouvoir se consacrer à ce qu'il pense être pour lui l'essentiel… S'abstraire de l'Avoir et des besoins matériels, s'abstraire de la quête éperdue des promesses du lendemain, s'abstraire des contraintes du travail et des ambitions qui l'accompagnent… S'atteler aux tâches simples pour lesquelles il est fait, jouant humblement sa gamme dans l'orchestre communautaire…
Le lieu y est aussi pour beaucoup… Passionné d'Histoire, et aussi d'Histoire de l'Art, chaque pierre est un peu comme un message d'un passé encore tellement présent. Même athée, je ne peux pas rester insensible à la beauté simple et parfaite d'une abbaye romane, aux jeux des lumières ocres entre les piliers, à la puissance d'une silence envoûtant, troublé, voûte après voûte, par le seul martellement des pas qu'on voudrait plus furtifs...
C'est un peu comme un rêve… On visite ces lieux et l'on s'assoit un moment, nous les incroyants, emplis par une atmosphère qui finalement nous manque ou pour le moins nous interroge. Sinon pourquoi ressentir cela ?
Mais ne craignez rien, malgré ces instants fugitifs, je suis encore bien ancré dans le réel, il faut savoir qu'un ingrédient, et non des moindres, est nécessaire, la foi… Sinon cet espace hors du temps qu'il nous arrive d'envier deviendrait vite un enfer, le comble pour une antichambre du paradis !…
Et d'autre part je suis trop attaché à la vie, avec ce tout qu'elle a de contradictoire, pour me réfugier dans un monde clos, réaction qui m'apparaît un peu comme une fuite. Même s'il elle est vécue comme un engagement par le croyant. Question de point de vue…
Et je préfère très nettement le whisky au vin de messe, et ça, c'est rédhibitoire !...
Il n'en reste pas moins vrai que tout cela pose problème. Je n'hésite pas à me répéter: « On visite ces lieux et l'on s'assoit un moment, nous les incroyants, emplis par une atmosphère qui finalement nous manque. Sinon pourquoi ressentir cela ? »
Ce monde qui se veut de plus en plus rapide, consumériste, cynique d'une certaine façon nous prive à coup sûr de quelque chose… Pas étonnant que le bouddhisme attire autant d'individus. Nous sommes comme amputés de quelque chose. Je dirais même amputés dès la naissance. Quelque chose à conquérir pour être plus complet, plus entier…
Et ce quelque chose, ne devons-nous compter que sur les seules religions pour l'acquérir ?...

A quand un programme politique qui intègrerait les notions de bonheur, de plénitude, de sérénité tout en mettant en avant, évidemment, les conditions matérielles nécessaire à leur obtention


En attendant, vous pouvez vous intéresser à l'oeuvre de Paul Diel, à sa "Psychologie de la motivation" entre autre,  qui nous met à jour les fausses motivations, les fausses illusions, les faux désirs,  qu'ils soient d'ordre matériel, spirituel, politique et même humaniste, et que notre inconscient, assez perfide, nous persuade de leur véracité et de leur pureté. Imagination exaltée et jamais satisfaite qui ne génère qu'une angoisse auto-reproductrice, imaginaire alimenté sans cesse par notre société mercantile qui nous éloigne de ce qui fait notre élan vital, le désir essentiel de tout homme qui, s'il ne s'aveugle pas ou n'est pas aveuglé sciemment, a tout pour trouver cette paix et cette sérénité. 


En acceptant de laisser humblement cette part du Mystère du monde que nous frôlons au coeur lumineux d'une cathédrale, dans le bruissement subtile d'un feuillage ou l'envol puissant gracieux d'une oie sauvage ...

samedi 30 juillet 2011

La mort du Sacré ?



Pour plus de facilité, mettons de côté le sacré au sens de  vital, important ... Il est évident qu'au plan individuel comme au plan collectif, tout ce qui m'est cher (un être, un objet, un lieu attaché à un souvenir) est dit « sacré »…
Jetons plutôt un coup d'oeil sur la notion de « Sacré » en tant que relation à ce qui nous dépasse et qui nous parle autrement, sur la plan symbolique, faute de pouvoir nous parler d'une manière effective. Le sacré en tant que vecteur de l'Indicible…

Je me suis beaucoup intéressé à Mircéa Eliade en général et au livre de Roger Caillois « L'homme et la sacré » entre autres.
Mircea Eliade: « L'occidental moderne éprouve un certain malaise devant certaines formes de manifestations du sacré : il lui est difficile d'accepter que, pour certains êtres humains, le sacré puisse se manifester dans des pierres ou dans des arbres. Or, il ne s'agit pas d'une vénération de la pierre ou de l'arbre en eux-mêmes. Les arbres sacrés ne sont pas adorés en tant que tels ; ils ne le sont justement que parce qu'ils sont des hiérophanies, parce qu'ils "montrent" quelque chose qui n'est ni pierre ni arbre, mais le sacré ».
On rejoint ici toutes les préoccupations du moment sur le « désenchantement du monde ». Le monde désenchanté est peut-être un monde où cette perception du sacré a disparu, du moins dans nos sociétés occidentalisées. Ainsi certains verront dans la terre qu'ils foulent ou le ciel qui les surplombe, simplement de la terre ou un ciel ensoleillé prometteur de coups de soleil à la plage ou bien encore un assemblage de gaz variés. D'autres y verront plus que cela ou même n'y verront pas cela du tout, ils y verront autre chose... Pour être plus exact, ils y pressentiront autre chose...

« Le Monde n'est pas un Chaos mais un Cosmos. Le Ciel révèle directement, "naturellement", la distance infinie, la transcendance du dieu. La Terre, elle aussi est transparente: elle se présente comme mère et nourricière universelle. Les rythmes cosmiques manifestent l'ordre, l'harmonie, la permanence, la fécondité. Dans son ensemble, le Cosmos est à la fois un organisme réel, vivant et sacré: il découvre à la fois les modalités de l'Etre et de la sacralité. »
Ainsi, qu'on cherche à la comprendre par la science, à l'expliquer par le mythe ou une révélation, qu'on l'explore en profondeur ou dans l'espace, la Nature, par ce qu'elle est, par essence, se donne déjà à voir comme Transcendance, naturellement... Même en ce début du 21ème siècle, si nous avons presque épuisé ses ressources naturelles,  nous n'avons pas encore épuisé, loin s'en faut, sa part de mystère et d'inconnu...  Il suffit de l'observer, de s'en imprégner pour immédiatement être face au Mystère… Nous avons, en partie, perdu cette faculté et nous en souffrons. Nous cherchons à la compenser par la Raison techno-scientifique triomphante, par la Foi religieuse en des dogmes confortables, par des dérives vers la magie, l'astrologie, les drogues, la quête matérialiste, etc…
Rappelons-nous ce film savoueux  "Les Dieux sont tombés sur la tête" de Jamie Uys. Même quand un objet de consommation, la bouteille de coca,  fait irruption dans le monde enchanté des Bushmen, elle est immédiatement investie d'une aura divine. Cadeau empoisonné d'ailleurs qui sèmera la discorde... Le Sacré imprègne la pensée primitive, sert de filtre d'interprétation entre l'homme et le monde visible ou invisible... Il ne s'agit pas de revenir à cela évidemment. Mais sommes-nous si sûr de pouvoir nous en dispenser totalement ?  D'ailleurs, notre Bushmen n'était peut-être pas très loin de la vérité. Le Dieu Coca cola a-t-il pas ses adorateurs de par le monde ?.. :)

 Roger Caillois "Le sacré est ce qui donne la vie et ce qui la ravit".
Tout est là, le sacré est dans le mystère de nos origines, nos doutes sur nos fins dernières, la présence du vivant et de la mort, du tréfonds de nos cellules aux confins de l'univers, et le Mystère du Pourquoi et du Comment ... Cette sensation d'un Absolu qui nous dépasse certainement, nous pouvons en faire l' expérience dans notre vie quotidienne lorsque, pendant un instant, on est comme abstrait de ce quotidien, le temps d'un "contact" fugitif avec le Sacré... Sensation fuyante d'un Sacré indicible et inaccessible et qui pourtant se manifeste, à travers les force naturelles, la beauté d'un paysage, l'intensité d'un évènement, la perception de quelque chose de diffus, confus…
Nous sommes à la fois emplis d'admiration et au bord d'un malaise, d'une angoisse. Il suffit de fondre son regard dans un ciel nocturne estival pour en ressentir les effets. C'est la force de notre Imaginaire, notre capacité à produire du symbole qui nous fait pressentir « autre chose » . La pensée symbolique nous est essentielle. Sans elle, pas d'art, pas de langage, pas de poésie, pas de publicité même, etc … et pas de sacralité. C'est pour cela, je crois, que le Sacré, indicible par essence, a besoin de gestes, de paroles, de chants, de symboles pour être appréhendé, capté et, en quelque sorte, piégé par les rituels qui permettent de le renouveler, de l'alimenter en permanence. De garder le contact… Rituels religieux bien sûr mais aussi rituels politiques ou sociologiques (commémorations, symbolique du drapeau, etc…)
Ce respect mêlé de peur, cette admiration qui peut confiner à l'effroi font du Sacré quelque chose de profondément ambivalent… Approcher le sacré peut se révéler bénéfique ou profondément négatif. D'où la notion de tabou associé au sacré, de transgression...et de châtiments possibles.

On peut encore parler longtemps sur le sacré. C'est un champ de réflexion d'autant plus passionnant qu'il opère en bordure de la raison et de l'imaginaire, quelque part où se situe peut-être ce qu'on appelle le spirituel... Disons que c'est une dimension de la relation au monde que nous avons cherché à occulter au nom du progrès et de la science. Comme si la pensée rationnelle ne pouvait cohabiter avec aucune autre forme de pensée. La pensée symbolique devenant le refuge des croyants, des artistes, de l'enfance ou du fantasque… Réenchanter le monde c'est peut-être essayer de retrouver ce lien et de l'adapter à notre vision contemporaine…
Chaque découverte scientifique perce le voile du Mystère pour s'ouvrir...sur le Mystère à nouveau. La quête du Spirituel ne doit pas être réservée à des spécialistes et circonscrites à des domaines précis. Elle est dans le questionnement du monde et de soi, la possibilité de l'Emerveillement encore et toujours, et particulièrement là où, dans sa Quête, le chercheur nous emmène,  au-delà des systèmes solaires ou au plus profond de nos cellules, à nos origines les plus lointaines ou vers nos rêves les plus utopiques...  Le chercheur, le scientifique d'aujourd'hui, n'est-il pas constamment sur le front de l'Inconnu, en quête de sens, en quête de vérités, en quête d'un Graal qui s'éloigne sans cesse au fur et à mesure qu'on s'en approche ?...
Je pense à Bachelard et à ses rêveries sur le feu, à celui qui sut emmener la poésie faire un bout de chemin au carrefour du matérialisme, de l'empirisme et de l'idéalisme...