... et aussi le simple plaisir d'écrire.

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Un peintre qui crée essentiellement une peinture figurative qu'on peut appeler fantastique, onirique, surréaliste,... Comme on veut... Bien que je ne sois pas insensible à toute forme d'art pourvu qu'elle me paraisse sincère et qu'elle provoque quelque chose en moi... Depuis toujours, je tente de peindre l'individu et la multitude, la matière brute et la lumière intérieure, l'arbre de vie, la femme et les racines, l'enfant et le devenir, la foule errante en quête de valeurs à retrouver, les voies parallèles, les mystères des origines et de la fin dernière... Les “SEUILS”, les félures, les passages qui font de nous d’ éternels errants insatisfaits entre mondes réels et rêvés , entre soi et autrui, entre Vie et Mort, entre bonheur et malheur... Un acte de peindre, nécessaire, à l'origine de rencontres furtives mais intenses, et qui fait naître, quelquefois, au bout d'un pinceau fragile, une parcelle de soi... ...ou tout simplement le plaisir et la douleur de créer...
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jeudi 21 juillet 2011

Manque et compensation.

Il y a une dizaine d’années, ma femme et moi, pour une raison que je vous livrerai à la fin, avons agi bénévolement dans le cadre d’une association qui s’occupait de venir en aide aux toxicomanes, en particulier des consommateurs d’héroïne. Surtout ma femme d’ailleurs qui, après un passage obligé par une formation, fut beaucoup plus sur le terrain, dans l’accompagnement actif de jeunes en période de sevrage…
On a pu ainsi observer quelques constantes, discerner des profils mais sans volonté de généralisation. Chaque individu est particulier, a sa propre histoire même si l’on retrouve assez souvent des canevas, des arrière-plans semblables dans lesquels se développent ces histoires, ces moments de vie bien particuliers…

Je vais enfoncer une porte ouverte si je vous dis que beaucoup tourne autour du manque…  et de la compensation.  Un manque qui peut se traduire plus tard par de la frustration, un sentiment d’infériorité, des complexes qu’il nous faudra compenser comme pour rétablir un équilibre… Nous savons tous l’importance de l’affectivité chez l’homme et corollairement du manque d’affectivité, en particulier chez l’enfant. Et même sans aller jusqu’à la consommation de drogue dure, nous développons tous, chacun à notre manière, tout un arsenal de contre-attaques pour faire face à ce manque éventuel, plus ou moins patent selon les individus. Nous mettons en place d’innombrables stratégies pour combler, consciemment ou non, un vide dont, par définition, la nature a horreur …

Peut-être même naissons-nous tous avec, dès le départ, un manque qui serait du domaine existentiel, comme une sorte d’incomplétude et que nous cherchons plus ou moins, toute notre vie durant, à combler… La plupart du temps par l’Avoir faute de complètement Etre… je me demande même si l'égo n'est pas la cause de nos maux mais à l'origine une conséquence quasi existentielle. Nous naissons, semble-t-il, avec un manque, une incomplétude et nous comblons ce manque, ce vide, que nous pressentons seulement, par tout un échafaudage, une construction mentale, l'ego... L'ego serait alors une compensation à un état de fait inhérent à chaque homme

Nous compensons tous car qui peut se prévaloir d’une enfance idéale ou d’être un individu complet et parfait…. A chacun sa manière, achat d’objets, nourriture, sexe, ambition, création artistique, travail, etc, etc… On peut ainsi voir la vie comme un immense jeu de compensation… Freud y voyait l’expression de la libido. Peu importe !…   Là où le bât blesse, c’est lorsque le phénomène devient excessif, compulsif. Nous entrons alors dans le domaine de l’addiction, la ligne rouge est franchie. Lorsque l’envie de manger devient boulimie ou anorexie, lorsque l’envie d’acheter devient achat compulsif, irrépressible ou cleptomanie, lorsqu’une activité, quelle qu’elle soit, m’occupe quasiment jours et nuits et me coupe du monde...

Si je reviens à mon point de départ, on a pu constater que souvent, il fallait 3 facteurs réunis pour que le processus s’installe: une rencontre, à un moment donné (fragilité passagère ), entre un individu donné (besoin de compensation) et un produit donné (héroïne par exemple). Il suffit qu’un des facteurs soit absent pour que la rencontre n’opère pas…
Très souvent, le manque affectif dans l’enfance est plus important, ce qui peut expliquer ce besoin de compensation. Mais rien n’est déterminé. On peut très bien avoir souffert d’un grand manque affectif pendant les premières années de sa vie et ne jamais devenir toxicomane… Heureusement, sinon les 3/4 de la planète seraient accros !…
On a pu constater aussi, dans les familles en difficultés, une « absence » du père. Par absence, je veux dire que le père, souvent au chômage depuis plusieurs années, a disparu en tant que modèle même s’il reste présent physiquement…. On y trouvera souvent, par compensation, une mère très présente, trop présente peut-être.

Quelquefois un trop plein peut avoir les mêmes effets qu’un manque….

L’héroïne s’est aussi introduite chez les couches aisées de la population… Paradoxalement, le manque y côtoie le trop plein. Manque affectif dû à l’absence des parents souvent accaparés par des métiers prenants et exigeants. Trop plein matériel que les parents octroient aux enfants par compensation (c’est eux qui compensent d’abord), culpabilité inconsciente peut-être… On a ainsi des enfants qui, du point de vue matériel, ont tout, tout de suite,… sauf l’essentiel. Plus tard, pour peu que la vie ne corresponde pas à leurs attentes, le manque deviendra frustration et réclamera sa part de compensation, à la mesure du manque éprouvé...
Les racines du mal peuvent aussi s’ancrer dans un trop plein, un trop plein d’exigences de la part de parents qui, obnubilés par la peur de l’échec social de leur descendance, placent la barre très haut, trop haut, ne laissent aucun répit, et transmettent insidieusement à l’enfant leurs propres angoisses et la peur de l’échec… Peur aussi de les décevoir… ça passe ou ça craque… Ici, le manque affectif n’existe pas mais l’affectivité est comme occultée par la pression d’un enjeu quotidien. Des chaînes que l’on se met à soi-même, bien cadenassées.

Je me souviens... Lorsque mes parents se séparèrent une première fois, ça fait un bail !…, je devais avoir 4 ou 5 ans, mon père vint me voir avec une superbe voiture, un modèle réduit remarquable, bleu acier, je crois… Sur l’instant, je fus content et quelque temps plus tard la voiture resta abandonnée dans un coin… Attitude compensatoire typique d’un parent qui culpabilise ou qui tente d’  « acheter » l’enfant. A cette époque,  les divorces étaient « sanglants » et l’on ne faisaient pas de quartier.

Pour terminer, je vous avais promis, dans le prologue,  de vous dire le motif de notre engagement dans cette association. Nous avions une voisine qui élevait ses deux fils et que nous avons vus grandir. Quand l’aîné eut une vingtaine d’années, il vint assez souvent chez nous, il s’intéressait à mes peintures, etc… Il semblait différent de son frère, plus rêveur, plus « artiste », plus communicatif aussi. Un  jour, il nous demanda de lui prêter un peu d’argent et recommença 2 ou 2 fois…
Une nuit, le SMUR  fut alerté et l’on apprit sa mort… Overdose…. On n’avait rien vu venir…
Pour info, le père était décédé depuis plusieurs années… Un manque que cet esprit sensible et fragile compensa dans la drogue. Son frère, resté seul avec sa mère, compensa autrement: travailleur acharné, parti d’un simple BEP, il est actuellement cadre d’une grande entreprise parisienne… A chacun sa stratégie.

Il y a 3 facteurs: la rencontre d’un individu donné,  avec un produit donné, à un moment clé d’une existence...  Le 2ème frère a peut-être rencontré le produit, à un moment aussi difficile pour lui mais il n’était pas le même individu avec les mêmes besoins….

mardi 19 juillet 2011

Etre et avoir.

Difficile d’être sans avoir, à moins de vivre comme Diogène… et de parvenir à être sans avoir. Tout ce qu’on peut dire c’est que l’être se renforce au détriment de l’avoir et réciproquement.

Mais l’avoir ne peut-il pas se décliner de différentes façons. On pense tout de suite aux objets, à la possession d’objets. Celle-ci fait partie de la vie. Tant qu’elle ne devient pas pathologique, tant que nous résistons plus ou moins bien aux sirènes de la consommation, on peut espérer être avec un avoir raisonnable, essentiel mais aussi avec un peu de superflu . Nous ne sommes pas des anachorètes quand même.... D’ailleurs pour le devenir, il faudrait s’exiler bien loin…Diogène ne vivait pas dans la société de consommation qui est la nôtre. Aurait-il résisté aux attraits d’Internet ? Peut-être aurait-il emporté dans son tonneau un téléphone portable, en cachette ?  Mais l’avoir ne se limite pas aux objets: il étend ses filets sous toutes formes de possession: le pouvoir, la puissance, la possession dans le couple, un travail, même la tombe qu’on prévoit...

On peut aussi penser qu’avoir c’est aussi avoir le désir de…  Il est certain qu’avoir rassure, conforte, apporte, peut-être à tort, un sentiment de sécurité. Certains objets sont aussi bien plus qu’un écran tv ou  un aspirateur. Ils sont  emprunts d’une charge affective, ils condensent, servent de support à nos sentiments, un souvenir, une image de soi. On peut penser qu’une part de la construction de l’Etre se fait peut-être aussi à travers ses objets… Ils  sont bien plus  alors de simples objets utilitaires. D’ailleurs l’objet lui-même s’efface alors  derrière sa force de  représentation…

Mais si tout cela m’aide à construire un Moi, on se situe là évidemment plus du côte de l’Ego que du côté de l’Etre profond. Et la seule pensée qu’on puisse perdre ce qu’on possède nous terrifie. Parce qu’ici nous sommes dans le stable, le connu et que nous avons tendance à toujours vouloir rajouter du nouveau qui s’intègre très vite dans le connu et le stable, éternellement alimenté afin de construire nos « remparts » identitaires… L’objet me rassure, il me renvoie un fausse image positive de moi-même et revoie aux autres cette image qui m’apparaît valorisante .  Quand Madame va faire ses courses en centre ville en gros 4x4, c’est son ego qu’elle déplace avec elle plus qu’un bien utilitaire adaptée à la situation…

Mais comme on ne peut pas vivre comme un singe nu, une meilleure santé de l’Etre commencera peut-être par porter sur toutes mes possessions le regard le plus objectif et lucide possible. Dans la société actuelle, il semble illusoire de vouloir être pour être. Nous reportons souvent alors notre incapacité à sortir du système en nous projetant sur des figures idéalisées qui, elles, ont osé faire le pas: l’artiste maudit, le poète, le héros solitaire (pensez à Charlot), … Bouddha et Jésus n’en sont-ils pas l’exemple même ? Ils se sont débarrassés de l’avoir pour n’être plus que des corps/esprits et un enseignement… qui est leur parole et leur personne même devenue exemplaire. Les mythes grecs fustigeaient l’humain qui s’était laissé enchaîner par le matérialisme ou qui avait succombé à la démesure.  Les Grecs parlaient alors de la « mort de l’âme », la fin de l’Etre…

Il faut être assez humble cependant. N’est pas Jésus qui veut… Savoir prendre du recul, savoir pourquoi on agit ainsi ou on achète cela, aller à l’essentiel, scruter en soi les réactions de l’ego, c’est déjà pas si mal… C’est vers la fin, en se retournant vers son passé, qu’on comprendra alors si on n’a été que ce qu’on possédait...ou un peu plus.

Pour terminer, 1 citation d’Epicure qui avait déjà tout compris:

"Si les Dieux voulaient exaucer les voeux des mortels, il y a longtemps que la terre serait déserte, car les hommes demandent beaucoup de choses nuisibles au genre humain."