... et aussi le simple plaisir d'écrire.

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Un peintre qui crée essentiellement une peinture figurative qu'on peut appeler fantastique, onirique, surréaliste,... Comme on veut... Bien que je ne sois pas insensible à toute forme d'art pourvu qu'elle me paraisse sincère et qu'elle provoque quelque chose en moi... Depuis toujours, je tente de peindre l'individu et la multitude, la matière brute et la lumière intérieure, l'arbre de vie, la femme et les racines, l'enfant et le devenir, la foule errante en quête de valeurs à retrouver, les voies parallèles, les mystères des origines et de la fin dernière... Les “SEUILS”, les félures, les passages qui font de nous d’ éternels errants insatisfaits entre mondes réels et rêvés , entre soi et autrui, entre Vie et Mort, entre bonheur et malheur... Un acte de peindre, nécessaire, à l'origine de rencontres furtives mais intenses, et qui fait naître, quelquefois, au bout d'un pinceau fragile, une parcelle de soi... ...ou tout simplement le plaisir et la douleur de créer...
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mercredi 3 août 2011

L'atelier.




Le temps des expos est terminé,... pour quelques mois. Il faut reprendre le chemin de l’Atelier. Vous me direz peut-être: pourquoi cette injonction ? Il faut que .... Ce devrait être facile, aller de soi, couler de source. Eh bien non ... Ou il faudrait ne jamais s'arrêter, créer dans un perpétuel mouvement, ne jamais sortir de cet état étrange, de ce qu'on nomme le processus de création.

Evidemment, c'est subjectif. Le cas de l'un n'est pas le cas de l'autre. Mais pour ma part, créer est un joie immense et une douleur  lancinante à la fois. ....
Voici le processus si cela peut intéresser certain(e)s… Au-delà de mon petit cas personnel, on peut y voir le problème de la création en général et du processus vital en très général…..... ....
Commençons par un présent dans la passé: la maison baigne dans un silence paisible et nocturne. Tout le monde dort…Il me faut toujours passer par là pour (re)commencer. S'isoler, s'imprégner, se mettre dans le bain, comme on dit. ....
C’est l’heure propice où l’on se retrouve seul face à la toile blanche, un futur autre soi-même, miroir sans concession. On ne s’y voit pas, on est censé y projeter ce qu’on  y voit, ce qu’on voit  en soi, et le retranscrire par une technique et des matériaux divers. Là est la difficulté: on pressent, on voit un schéma mental qui s’organise, ça y est ! On le tient… et le résultat déçoit bien souvent. La transmutation peut ne pas s’exercer. .... ....
Car pour cela, il faut certaines conditions. Il faut rentrer dans l’Atelier et pouvoir poser ses valises lourdes des peines et  soucis quotidiens…
Mais je m'égare. Reprenons ! La maison baigne dans un silence paisible et nocturne. Tout le monde dort… ....
La seule source de lumière provient de l’Atelier, un spot anachronique par son enveloppe métallique dans un monde immobile, en suspens... Car ici, tout semble hors du temps, des livres qu’on aime entasser à perpétuité après les avoir savourés, des objets du passé un peu passés, des photos qui témoignent d’une heure à part, des toiles anciennes appuyées face au mur comme punies d’avoir été, une table basse supportant palette, tubes, médium, couteaux et pinceaux, bric à brac et outillage de base, matière brute d’une rusticité déconcertante au temps de l’art digital. Le chevalet et la toile vierge … qui attendent. Et pour donner du cœur à l’ouvrage un cd de « My Dying Bride »… Hum ! Mise en condition pleine de frissons pour un saut dans les profondeurs. .... Une autre fois, un p'tit Pink Floyd, plus léger et aérien. Cela dépend de l'humeur du soir.
Les sentiments ambigus commencent à émerger.  Angoisse et excitation.Vais-je ressentir ce plaisir à créer, mis entre parenthèse pendant un temps, et pourtant toujours si présent ? Sans lui, impossible de continuer, de supporter les longues heures de labeur, de dépasser les doutes et les difficultés techniques..... Mais il faut se détacher, s'abstraire des contraintes matérielles et laisser parler l'Imaginaire. Difficile. Tout est là, un magma d'images rencontrées dans la vie réelle, photographiées au hasard des promenades, dans le rêve, dans l'Art des autres (cinéma, photo, peinture ...), un bouillon de culture comme dirait l'autre, de mots lus et relus, issus d'oeuvres les plus diverses (SF, fantastique, littérature anglo-saxonne, scandinave, russe) mais aussi en toile de fond, le substrat biblique et mythologique ... Que faire de tout cela ? Comment l'ingérer, le digérer, sans le retranscrire tel quel ? Comment en faire une création personnelle pourtant induite de tout ce contenu cérébral ? Comment dire, exprimer autre chose tout en sachant qu'on ne fera que répéter éternellement la même chose ? .... Difficile d'oser une telle entreprise.
On en revient donc au désir et à la dose de nécessaire Illusion qui met tout en œuvre. Le désir, le levier de toutes nos actions, l’envie, la motivation, l’aspiration… Sans le désir, même si l’Illusion le mène par le bout du nez, rien n’est possible. Pourtant, il ne va pas de soi, on peut le perdre, l’égarer, s’en détacher… On peut lui courir après, vainement… Il peut se faire désirable...  Mais il ne suffit pas de vouloir désirer pour désirer. Comment expliquer alors ce jeu du chat et de la souris avec cet élan essentiel, le moteur de la Vie qui devrait aller de soi ?....... ....
Il met arriver de perdre ce désir, bien souvent… Celui d’œuvrer pour le plaisir, pour la chose en soi, l’acte de peindre. Et même celui qui tend vers un but, indépendamment de ce qu’on ressent en agissant. Ce qu’on appelle, pour faire savant, la motivation intrinsèque et extrinsèque.
Mais soyons sérieux. Quand agir nous coûte, que le plaisir a disparu et quand rien ne se précise à l’horizon,  la mélancolie, l’apathie, voire la dépression guettent… Pourquoi cette sombre éclipse de la motivation ? Usure, déception, fatigue, douleurs, absence de sens ? Certainement un peu de tout, agrémenté à la sauce de l’aigreur, un peu aigre-douce forcément,  faite de ressentiment, de récrimination, de sentiment d’injustice, de la faute à « pas de chance » ou à la société…. Le cercle vicieux s’est mis en place: plus on souffre, plus on se plaint, moins l’on a envie d’agir et moins l’on agit et plus l’on souffre…. La douleur pouvant même servir de prétexte inconscient à ne pas agir…. Si si !...
Cet élan est en nous, dès la naissance certainement, l’appétit de vivre… Mais il puise et accroît certainement sa force dans la petite enfance, le modèle parental qui nous imprègne… ou l’absence de modèle: on peut être motivé par la rage !... 

Mais je m'égare encore. Incorrigible !...
Fermons donc la parenthèse du (non) désir. Dans les moments de doute, c'est souvent un poème de Marie-Ange Pigot qui m'inspire et je lui dois beaucoup, à Marie-Ange et à sa poésie en général… On y parle de souffrance, de destin, d’aspiration spirituelle… La tâche n’est pas simple: saisir l’essentiel sans simplement illustrer, s’imprégner, assimiler et extirper autre chose qui est pourtant le même... Extraire la peinture des tubes un peu durcis, lui redonner lumière mouvement, travailler la pâte et trouver la couleur espérée… On a peur mais le plaisir revient toujours, mélange d’espoir, d’attente, de tension, d’exaltation fugace …. Et la joie profonde de voir l’objet tant imaginé avoir enfin pris forme, mélange de matériaux et d’idées, de matière et d’esprit….
On prend du recul, on s’assoit, on boit un ricoré et on fume une petite roulée (petit péché pas très mignon mais tenace), on est satisfait… pour un temps.....

samedi 30 juillet 2011

L'errance de la toile blanche.





L’errance de la toile blanche.......
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Combien de fois suis-je tombé, devant la toile blanche, dans un état de profonde stupeur proche de la paralysie hypnotique ? Je ne saurais le dire…....
Un état très particulier que connaissent tous les créateurs et qui voit alterner des moments d’agitation exaltée proches de la confusion mentale, exaltation servie par le pressentiment de voir enfin de l’Informe naître la Forme tant espérée  qui voit alterner aussi ces instants étirés dans le temps, emplis d’abattement, de torpeur, de vide stérile et désespérant…....
Il s’agit bien d’engendrer à partir des méandres de l’Imaginaire et d’accoucher  d’un être tout aussi imaginaire, l’œuvre d’art… qui devient objet bien réel et pourtant bâti sur une pure idéalisation du monde…....
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Un paradoxe… ....
Pour supporter un monde construit en partie sur l’Illusion, que ce soit en le fuyant ou en l’affrontant, il nous faut créer de l’Illusion donnée elle aussi pour réelle…....
Une béquille parmi d’autres mais qui se fonde, elle en particulier, sur l’Illusion la plus manifeste, celle proposée par l’œuvre d’art, qu’elle soit peinte, écrite, filmée, numérisée, théâtralisée… ....
Une illusion que tout le monde feint d’appréhender pour réalité tout en sachant pertinemment qu’elle n’est qu’illusion pure. L’œuvre d’art est comme cet équilibriste qui marche à petits pas sur la corde reliant le réel et l’imaginaire. Elle participe des deux et se revendique comme telle. Un jeu entre  2 extrêmes particulièrement frappant au Théâtre qui exige que le spectateur joue le jeu dans l’instant où il se pose comme tel: un jeu de dupes intégrant immédiatement l’illusion pour le transmuter en faux réel…....
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Pourquoi donc, dans un monde où l’Illusion règne déjà suffisamment, ajouter encore d’autres formes illusoires qui, apparemment, n’ont aucune nécessité primordiale ?

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On pourrait pourtant en rester là et inventer, créer sans se poser de questions. Mais ainsi sommes-nous faits, des éternels demandeurs, des pinailleurs, des coupeurs de cheveux en quatre…. ....

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Combien de fois me suis-je posé cette question de la nécessité de créer ? Nécessité pour soi-même, nécessité pour les autres… Cela me laisse perplexe et, c’est avec le temps, que cette question s’est imposée de plus en plus… La jeunesse a quelquefois le privilège de l’enthousiasme et je peignais alors sans trop me poser de questions. L’envie, le désir l’emportait sur toute interrogation. Un désir qui met en branle une énergie à tout épreuve, un désir qui prend racine dans l’Illusion justement, la croyance… L’illusion que tout est possible… Jeu du désir et de la foi (en soi), jeu du désir et de la motivation… Fondamental.....
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Mais aujourd’hui, peste soit le nombre des années,  il m’arrive souvent de tourner autour de la toile immaculée à la virginité agaçante. « N’ai-je donc tant vécu que pour cette infamie ? » dirait l’autre.......
On se penche dessus, on s’assoit, on prend du recul, on va boire un café, on se rassoit, on reprend un croquis, on pose la toile verticalement puis horizontalement, on boit un autre café…. Tout plutôt que  faire le premier geste… Rien que du banal, l’angoisse de la page blanche, diriez-vous ? ....
Mais cela va plus loin ou plutôt cela va plus profond…

La question proche du lieu commun: pourquoi créer ? se double en fait de LA question existentielle: pourquoi vivre et comment vivre ? ....
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Si donner un SENS à ce monde relève de l’utopie, de l’INSENSE, il faut bien donner un sens , un petit sens, un sens des plus modestes à chacun de nos actes inscrits dans la banalité des jours… ....
Ma fille m’a dit: ‘Tu ressasses « . Soit. J’en prends acte, un acte de foi puisqu’il s’agit du jugement d’une personne essentielle. Alors laissons tomber quelquefois la quête du SENS ultime pour donner des petits bouts de Sens à l’Instant, même si la somme de ces parties ne nous renseigne en rien sur le SENS global du Tout…....
Damned ! J’ai progressé… Etre lucide sur ce qu’est notre monde tout en admettant notre défaite essentielle devant la force de l’Illusion. Elle nous est consubstantielle, qui pouvons-nous ?, elle fait corps avec la conscience. ....
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Jouer ainsi le jeu de l’Illusion tout en s’efforçant de ne pas y succomber corps et âme: projeter, anticiper, élaborer, planifier, créer au sens large… Et aussi ressentir, aimer, rêver, fantasmer, idéaliser, sublimer... ....
Qu’il est quand même doux de s’illusionner tout en gardant les pieds sur terre. La quadrature du cercle: les pieds dans la gadoue et la tête dans les étoiles.......
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Qu’il est finalement nécessaire de sublimer !...  Nous sommes dotés de cette conscience qui fait tant de mal quelquefois et nous avons ,à portée d’âme, l’antidote, la sublimation, cette fonction miraculeuse de la psyché, qui transmute le plomb en or. Le contre-poison qui fait que l'homme n'a de cesse de construire, imaginer, restituer, sous mille aspects, ce sentiment indicible de vacuité pour mieux l’annihiler avec cet outil unique dont il dispose, l'imaginaire symbolique. ....
Sinon pourquoi accorder tant d’importance à ces traces de matière jetés sur une triviale toile de lin ?
C'est peut-être cela que nous ressentons confusément dans notre relation à l’œuvre. Elle parle de l'artiste, de celui qui la regarde ou l'écoute, et d'un « plus » indéfinissable qui établit la relation entre les deux et la relation à un Indicible, ce qu’on pourrait appeler le « Mystère » faute de mieux…D'où le choc esthétique que l'on peut ressentir devant certaines œuvres, inexplicable mais palpable, choc qui semble la manifestation de ce point de rencontre si rare entre le créateur, l’observateur et un questionnement universel…....
J’ai donc décidé de ne plus ressasser… de désasser, si l'on peut dire. Le ressassement, pire le ressentiment, semble le premier pas vers le précipice Une seule arme contre lui: l’action. Même avec un zest de compromission vis-à-vis de l’Illusion… C’est le prix à payer pour éviter la chute dans la paralysie mélancolique de l’auto-analyse perpétuelle… Le tout agrémenté d’une bonne dose d’auto-dérision… et de Ricoré. Un fragile équilibre: il faut y croire sans vraiment y croire. Diable !, dirait Faust, avec raison… L’Illusion est bien une diablesse avec laquelle il nous faut pactiser sous peine de de mourir d’inertie.....
Alors, tout en restant vigilants, laissons encore quelques alouettes aux miroirs, peuplons le monde de moulins à vents, préservons nos châteaux en Espagne… Tel Sisyphe, grimpons et regrimpons sans fin…....
Il semblerait que ce soit notre punition et notre salut….