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Un peintre qui crée essentiellement une peinture figurative qu'on peut appeler fantastique, onirique, surréaliste,... Comme on veut... Bien que je ne sois pas insensible à toute forme d'art pourvu qu'elle me paraisse sincère et qu'elle provoque quelque chose en moi... Depuis toujours, je tente de peindre l'individu et la multitude, la matière brute et la lumière intérieure, l'arbre de vie, la femme et les racines, l'enfant et le devenir, la foule errante en quête de valeurs à retrouver, les voies parallèles, les mystères des origines et de la fin dernière... Les “SEUILS”, les félures, les passages qui font de nous d’ éternels errants insatisfaits entre mondes réels et rêvés , entre soi et autrui, entre Vie et Mort, entre bonheur et malheur... Un acte de peindre, nécessaire, à l'origine de rencontres furtives mais intenses, et qui fait naître, quelquefois, au bout d'un pinceau fragile, une parcelle de soi... ...ou tout simplement le plaisir et la douleur de créer...

samedi 16 novembre 2013

Le mythe identitaire. Episode 7. Nouvelle famille et propagande.


Père de famille expliquant la bible à ses enfants (Greuze)

D'abord un petit flash back en ce qui concerne la famille et les rapports entre générations
Les garçons, au Moyen Age, quittaient très vite le monde féminin. L'époque de Tanguy était encore lointaine. La vraie vie, faite de sociabilité, de solidarité s'exprimait à l'extérieur. L'adolescence était alors un stade d'apprentissage et d'intégration au sein de groupes de jeunesse appelés Royaume, Fraternités, Bachelleries… Cette appartenance constituait un rite de passage entre l'enfance et la vie adulte. Un moyen d'échapper à la tutelle étroite des adultes, d'attendre aussi le mariage (car la concurrence est rude), de compenser en affirmant sa virilité: bagarres avec les bandes des villages voisins, relations avec les prostituées (eh oui, la chair est faible. 3 pater en échange…), dénonciation des adultères ou des maris cocus ou même des maris battus par leur femmes au cours de virées nocturnes tapageuses sous les fenêtres des concernés (ce qui n'était pas du goût de l'intéressé, on s'en doute), somme d'argent réclamée aux veufs remariés ou aux conjoints venus d'ailleurs, les bougres !... Rôle essentiel des jeunes dans les fêtes de Mai ou de la Saint Jean. Vous pouvez remarquer que rien n'était prévu si le mari battait sa femme… puisque c'était conforme à la coutume. Damned ! Fallait pas en demander trop quand même…
Ainsi le rural n'est pas torturé par sa propre conscience, l'essentiel est d'adhérer aux normes collectives. La vraie peur vient d'un mépris possible de la collectivité envers soi, pas du péché individuel… Le curé du village n'a pas toujours la partie belle. Les jeunes célibataires jouent ainsi à se conformer à ce que l'on espère d'eux en tant que futurs hommes mariés. Ils apprennent les règles du patriarcat. Ils jouent en fait le rôle de régulateur (rien de plus conformiste en fait !).
C'est aussi un moyen d'éviter les conflits de génération et de détourner les frustrations imposées par les pères vers leurs alter ego étrangers, les autres jeunes. Une violence des jeunes gens à marier est donc permise, canalisée, régulée dans un système traditionnel qui sera déséquilibré par l'irruption de la justice et de la pénalisation.
Il n'y a donc pas de culpabilité intégrée dès l'enfance : en dehors du cadre du travail où là ça ne rigole pas, le père s'efface et la formation de la personnalité se fait hors de la famille.
Avec l'irruption du moralisme, les valeurs du couple conjugal, de la famille au sens strict vont peu à peu remplacer les solidarités rurales qui ne peuvent plus fonctionner, d'abord à la ville, puis dans les villages à fortes tensions où l'on brûle les sorcières. Désormais, la famille sous la tutelle totale du père/mari, va condenser, bon gré mal gré, amours et passions potentiellement destructrices qui, auparavant, pouvaient s'extérioriser dans les solidarités de jeunesse. On va commencer à «laver son linge sale en famille»...
Par ailleurs, est-il étonnant de voir s'intensifier la chasse aux «sorcières» au moment où la position de la femme dans la société se dégrade et que celle des pères s'affirme ?… Evidemment, tout cela est variable et se fait inégalement dans le temps et dans l'espace.
Les super-pères apparaissent sous l'égide d'un super-roi, le père à tous par excellence. Le tout couronné par un super-Dieu le Père punissant sans pitié les déviants… Le temps de la culpabilisation et le sens de la faute sont venus. La voie est libre, une voie royale si j'ose dire…
Rappelons nous le Chevalier de la Barre exécuté en 1776 en place publique ( le poing coupé, la langue arrachée avant de se faire décapiter et d'être jeté au bûcher) et que Voltaire tenta de réhabiliter. C'est le cas typique. Geste d'un libertin contre l'autorité religieuse (blasphème), révolte d'un noble contre l'autorité royale et révolte d'un jeune (il a 19 ans) contre l'autorité du père… Les rebelles contre le roi étaient d'ailleurs accusés «de crime contre leur père» !
Evidemment, cette tutelle des pères deviendra insupportable lorsqu'elle ne conduira plus à l'insertion sociale promise. On en sait quelque chose aujourd'hui… Il faudra attendre quand même le 20ème siècle pour que la femme conquiert ses droits et que volent en éclat certaines pesanteurs. Mai 68 n'est pas encore pour demain ...
On a ainsi mis en place des forces convergentes permettant de créer une conscience nationale en uniformisant la société autour de figures simples, proches de l'archétype, au détriment des particularismes. Chaque père devient l'agent inconscient de l'autorité à laquelle il peut faire d'ailleurs appel en demandant une lettre de cachet de sinistre réputation. Ainsi au 18ème siècle, le cadre institutionnel est en place, prêt à fonctionner. La propagande s'en donnera à cœur joie: coercition par les intendants, juges, officiers, autorité des chefs de famille, pression du clergé…
Un rôle important sera joué par une littérature de colportage éditée par la Bibliothèque bleue de Troyes Une littérature populaire, une imagerie populaire vendue dans les villages, véritable prémisse d'une culture de masse qui vulgarise l'idéologie dominante (obéissance, humilité, peur de la mort, contes et fééries pour faire oublier la dure réalité, absence de passion, de plainte et de révolte, modèle de l'homme humble et vertueux et... de la femme soumise). Comme quoi le formatage des esprits n'a pas attendu la télévision !… On propage par l'alphabétisation l'image d'un meilleur des mondes possibles, moral, hiérarchique, immobile… A l'inverse du rôle qu'il jouera au 19ème siècle avec Jules Ferry, l'écrit agit comme un levier pour casser la cohésion de l'ancien monde oral et communautaire dont on ne veut plus …
Les villageois qui savent lire les oeuvres impérissables de la Bibliothèque bleue de Troyes se sentent aspirés vers la haut et la fracture ne fait que s'agrandir.
Mais il y a aussi des poches de résistances. La révolution de 89 et le 19ème siècle positiviste vont aussi imprimer leur marque. Nous découvrirons cela dans l'épisode suivant, l'épisode 8…
L'épisode 9 et 10 (le dernier, enfin !) ne seront plus historiques mais contemporains et émaillés de réflexions plus personnelles sur les problèmes posés par la confrontation identité nationale/identité particulière.
Par honnêteté intellectuelle, je citerai, pour la partie historique, les sources qui m'ont été bien utiles à la fin du dernier épisode.
A demain si vous le voulez bien !

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