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Un peintre qui crée essentiellement une peinture figurative qu'on peut appeler fantastique, onirique, surréaliste,... Comme on veut... Bien que je ne sois pas insensible à toute forme d'art pourvu qu'elle me paraisse sincère et qu'elle provoque quelque chose en moi... Depuis toujours, je tente de peindre l'individu et la multitude, la matière brute et la lumière intérieure, l'arbre de vie, la femme et les racines, l'enfant et le devenir, la foule errante en quête de valeurs à retrouver, les voies parallèles, les mystères des origines et de la fin dernière... Les “SEUILS”, les félures, les passages qui font de nous d’ éternels errants insatisfaits entre mondes réels et rêvés , entre soi et autrui, entre Vie et Mort, entre bonheur et malheur... Un acte de peindre, nécessaire, à l'origine de rencontres furtives mais intenses, et qui fait naître, quelquefois, au bout d'un pinceau fragile, une parcelle de soi... ...ou tout simplement le plaisir et la douleur de créer...

mercredi 3 août 2011

Rêveries matinales ...


Ne vous arrive-t-il pas quelquefois de louvoyer, souvent le matin, dans un demi-sommeil, aux portes de la conscience ?… Entre deux rives, là où le rêve n’est plus, là où l’état de veille n’est pas encore… Ce que Sartre appelait les images hypnagogiques, je crois… Alternance entre des bribes de réalité et des phases à peine rêvées, semi conscientes, comme une réalité à peine déguisée...
Ou devant un feu de bois qui nous joue un ralenti à la Lelouch, une flamme vacillante de bougie à la De La Tour, hypnotique… On semble alors, en quelques minutes, rejouer le long cheminement d’une humanité perdue entre ses longues errances où dominait jadis l’imaginaire d’une pensée magique, traversées de traits de clairvoyance, d’une humanité où la part de rêve s’incarnait dans les Dieux pour, peu à peu, s’éveiller péniblement de  la torpeur rassurante des croyances, hésiter encore et toujours, avant d’oser, pour une bonne part d’elle-même, se frotter des yeux encore lourds d’une somnolence millénaire et oser regarder, en face, le soleil matinal de la Raison...

Mais lorsque la fatigue pèse lourdement sur les épaules, lorsque le monde alentour nous déçoit, qu’il semblerait bon de retrouver le monde rêvé de l’enfance, les grandes illusions de la jeunesse en se  réfugiant, ne serait-ce qu’un temps, dans la douce inertie de l’irrationnel, en frappant à la porte des marchands de rêves… Retrouver, comme ce moment matinal savoureux où il n’est plus temps de dormir mais pas encore temps d ‘agir, un « entre deux mondes » où le réel serait présent à soi-même mais comme débarrassé de toute agressivité, de tout danger potentiel, un réel magnifié, un réel que l’on pourrait pétrir à sa façon, sur lequel on aurait prise. Le rêve, quoi !…

Mais chaque matin, il  faut bien se dire que le réel ne se limite pas à une couette en duvet d’oie argentée des Pyrénées triple confort et poser  un regard lucide, enfin presque,  sur notre environnement, sur nous-mêmes …

Mais même complètement éveillé, prêt à l’action, nourri au Ricoré et bardé de Nutella, force est de constater que, sûr de ma capacité en ma Raison, de ma maîtrise sur un réel désenchanté, je ne suis pas que raison… Les yeux grand ouverts, débarrassés des scories de l’enchantement religieux, il me faut bien admettre que je suis aussi  poésie, imaginaire, sensibilité irrationnelle, émotion, instinct, pensée refoulée, inconscient… Même ce que perçois dans l’immédiat est déjà transformé dans mon esprit: la sensation devient objet psychique soumis à divers traitements de la psyché.
Notre conscience raisonnée semble  se nourrir constamment d’impressions, de sensations passées au filtre de la Raison mais aussi de l’Imaginaire… Chaque filtre étant plus ou moins important selon la conformation mentale de chacun… Si l’on aime les étiquettes: les rationalistes, les positivistes, les rêveurs, les poètes...

Jung suggère même que nous naissons avec un inconscient chargé des expériences passées de l’espèce. Nous avons en nous de l’archaïsme, le fameux cerveau reptilien mais aussi un inconscient lourd déjà, à la naissance, du poids des millénaires (et qui se manifeste dans l’irruption de ce qu’il appelle les archétypes). Ainsi, nous sommes animés par des stimuli externes mais aussi par des forces internes, difficilement appréhendables mais présentes et actives et dont se nourrissent notre imaginaire, notre sensibilité, nos émotions,...nos névroses, nos complexes, nos peurs… Il reste toujours en nous une part du  primitif qui  agit selon des schémas dont la signification lui est inconnue.
Ne sommes-nous pas un  terrain de conflits entre le caché et le conscient, l’irrationnel et le rationnel, ce que nous nommons le bien et le mal, le subjectif et l’objectif, la joie et la peine. Dualité à laquelle il faut sans cesse échapper pour trouver le juste équilibre. Dualité peut-être nécessaire, propre à la vie elle-même et qui sans cesse se module, se transforme, se relativise … Les 2 faces du vivant entre lesquelles on louvoie en permanence et qu’il nous faudrait intégrer en une unité.
L’homme moderne veut dominer ses émotions mais la conscience ne se nourrit-elle pas aussi  de chocs émotionnels essentiels ? Lutter, dominer, combattre ce qu’on est au nom de codes sociaux dominants ou d’une idée peut-être erronée qu’on se fait de de soi-même semble un combat perdu d’avance…

Qu’il serait doux de faire de sa vie comme un reflet de ce moment fugitif de la rêverie matinale où l’esprit et le corps s’acceptent, où l’on baisse sa garde pour faire avec les différences, le réel et l’imaginaire, comme une imbrication idéale des contraires (à l’image du symbole du Yin et du Yang) !… Alors que, dès la journée commencée, la lutte interne, millénaire, se joue à nouveau dans notre petit théâtre intérieur...
Comme si nous avons perdu  une écoute particulière. … Une écoute  de nos rêves, de nos motivations profondes, de nos actes inconsidérés, de nos pensées fugaces, de notre volonté créatrice… Une écoute vers l’autre et l’ailleurs: l’homme, l’animal, la nature, le mystère… On a beaucoup écrit sur le « désenchantement du monde », inutile d’épiloguer...

Pour terminer: je ne peux m’empêcher de citer quelques passages de  Jung extraits de son livre « L’homme et ses symboles »

« Ce que nous appelons "la conscience de l'homme civilisé" n'a cessé de se séparer des instincts fondamentaux. Mais ces instincts n'ont pas disparu pour autant. Ils ont simplement perdu contact avec notre conscience et sont donc forcés de s'affirmer d'une manière indirecte.  » 

L'homme aime se croire maître de son âme. Ses dieux et ses démons n'ont pas du tout disparu. Ils ont simplement changé de nom. Ils le tiennent en haleine par de l'inquiétude, des appréhensions vagues, des complications psychologiques, un besoin insatiable de pilules, d'alcool, de tabac, de nourriture, et surtout par un déploiement impressionnant de névroses. 
L'homme moderne ne comprend pas à quel point son "rationalisme" (qui a détruit sa faculté de réagir à des symboles et à des idées numineux l'a mis à la merci de ce monde psychique souterrain. Il s'est libéré de la "superstition" (du moins il le croit) mais ce faisant, il a perdu ses valeurs spirituelles à un degré alarmant. Ses traditions morales et spirituelles se sont désintégrées, et il paie cet effondrement d'un désarroi et d'une dissociation qui sévissent dans le monde entier. »

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